
(...) Mélenchon a centré son discours sur l’articulation entre la politique du président de la République et celle d’une UE qu’il souhaite totalement refonder avec Maintenant le peuple, le bloc d’alliance qu’il a fondé avec les Espagnols de Podemos et les Portugais du Bloco de Esquerda. À plusieurs mois des élections européennes, la rhétorique du leader de La France insoumise est déjà rodée.
L’écologie, la rampe de lancement
Pourtant, après trente minutes d’allocution, le chef de l’État reste plutôt épargné. Jean-Luc Mélenchon file une longue tirade sur une seule et même thématique : l’écologie. Il évoque le changement climatique, la biodiversité qui est entrée dans la sixième ère d’extinction massive des espèces, le grand cycle de l’eau qui s’en trouve perturbé. Et la nécessité d’introduire la règle verte dans la Constitution française et de mettre en place « une planification écologique ».(...)
« Ceux qui disent que l’on peut avoir une vraie politique écologiste en restant dans le cadre des traités européens mentent ! C’est de l’arnaque, de l’enfumage ! » a affirmé Jean-Luc Mélenchon, visant les responsables d’EELV et de Génération·s.
Changer les traités : la condition inébranlable pour La France insoumise afin de mettre en place son programme « L’avenir en commun ». Ce que le mouvement FI appelle son « plan A », qu’il compte négocier avec les autres États membres une fois au pouvoir. Et si l’Allemagne et ses alliés s’y opposent ? « Plan B : on le fera quand même ! » tonne le leader. Plus question donc, formellement, d’agiter le chiffon rouge d’une sortie de l’UE. Signe d’un adoucissement au moment où La France insoumise souhaite rassembler encore au-delà de ce qu’elle a réalisé en 2017, aussi bien au niveau de son électorat que sur ses possibles ralliements politiques.(...)
Une « raclée démocratique » pour Macron
« Mettre un bulletin France insoumise, c’est une manière de leur dire : Dégagez ! Allez au diable ! » Jean-Luc Mélenchon arrive au cœur de son propos, qu’il devrait tenir, lui, ses lieutenants, ses candidats, jusqu’au scrutin de mai : il faut mettre « une raclée démocratique » à Emmanuel Macron, car il ne serait que le pantin articulé de la Commission européenne. La réforme du Code du travail ? Bruxelles. La réforme de la SNCF ? Bruxelles. La privatisation des barrages hydrauliques ? Bruxelles. Il en va de même pour la refonte du système de retraites prévue pour le premier trimestre 2019 et qui sera, selon la plupart des cadres Insoumis, la mère des batailles à venir.
« Une attaque frontale contre le modèle social puisque les retraites touchent tous les mécanismes de solidarité », résume le député de Seine-Saint-Denis Éric Coquerel, notamment par l’introduction d’un système par points. Là encore, le rapprochement est vite opéré : « Les gens vont découvrir cette histoire de retraites par points, et quand ils auront compris que c’est l’Europe qui a demandé ça, ils mettront un bulletin France insoumise dans l’urne. C’est pour ça que c’est un référendum contre Macron ! » s’écrie le président du groupe LFI à l’Assemblée sous les applaudissements.
Comme souvent, Jean-Luc Mélenchon a ordonné son discours en fonction aussi des interrogations formulées par la presse, de la disparition progressive du plan A/plan B dans la stratégie de communication sur la stratégie européenne jusqu’au sujet de l’immigration qui bouscule ces temps-ci le mouvement de la gauche radicale.(...)
Sans un mot pour son homologue, le leader des Insoumis a précisé la position de son mouvement, qui est double : accueil des réfugiés, d’un côté, arrêt de toutes les politiques qui font émigrer les populations, de l’autre (le libre-échange, les accords de partenariat économique, les ventes d’armes qui accroissent les conflits, etc.). « Les gens ne partent pas par plaisir, mais qui les fait partir ? L’Europe ! Et les États-Unis. Et le capitalisme », a indiqué Jean-Luc Mélenchon, fustigeant la guerre en Syrie « où sont partie prenante les pays de l’Europe ». (...)
Concernant ses listes, La France insoumise a pris de l’avance sur ses concurrents : une liste de 66 candidats déjà constituée, des têtes de liste déjà désignées – Charlotte Girard ou Manuel Bompard, sauf retournement de situation ou prise de guerre… –, un bloc d’alliance continental en partie charpenté et, désormais, un axe de campagne fort décrété par le leader. Une nécessité. Si le scrutin promet d’être très polarisé entre La République en marche et les deux partis populistes d’opposition, dans « ce référendum anti-Macron », il s’agit, aussi, pour La France insoumise, de ne pas laisser le Rassemblement national rafler les voix du camp du « non ».