
Julian Assange, le fondateur de Wikileaks, emprisonné depuis plus de trois ans, a été contaminé par le coronavirus dans sa prison de Londres. "Il a été testé positif au Covid samedi, le jour même où des milliers de personnes sont descendues dans la rue pour le soutenir", a déclaré lundi sa femme Stella Assange à l’agence de presse britannique PA. L’homme de 51 ans, qui est détenu sans inculpation dans la prison de haute sécurité de Belmarsh en raison d’une demande d’extradition américaine, est désormais "enfermé dans sa cellule 24 heures sur 24". Elle s’inquiète pour sa santé. Le journaliste, qui risque d’être jugé aux Etats-Unis pour avoir révélé des crimes de guerre américains, souffre déjà d’une pneumonie chronique et a été victime d’un mini-AVC en octobre dernier.
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Non loin de la gare centrale de Berlin, des activistes et des amis du persécuté politique organisent actuellement l’exposition "Noisy Leaks", qui se tient jusqu’au 30 octobre et a été inaugurée vendredi. Samedi, la journaliste italienne Stefania Maurizi a tenu la première conférence. Elle a commencé sa collaboration avec Assange et Wikileaks en 2009 sur les crimes de guerre américains en Afghanistan et dans la prison extraterritoriale de Guantanamo. En 2015, Maurizi a fait un reportage avec Wikileaks pour le journal italien L’Espresso sur les activités d’espionnage de la NSA, qui avait espionné non seulement la chancelière allemande de l’époque, Angela Merkel, mais aussi le Premier ministre italien Silvio Berlusconi.
Quelques dizaines de personnes intéressées ont écouté l’auteure, qui a souligné que Wikileaks avait radicalement changé le travail journalistique. Elle a décrit ses recherches sur le cas de l’imam Osama Nasr Mostafa Hassan, que la CIA avait enlevé à Milan en 2003 pour le faire torturer en Egypte. Les preuves de cette externalisation de la torture, appelée "extraordinary rendition" et pratiquée pendant des années par les services secrets américains, n’ont été révélées qu’avec les e-mails des ambassades publiés par la soldate américaine Chelsea Manning via Wikileaks. La journaliste d’investigation de longue date en est convaincue : "Les secrets d’Etat ne sont pas là pour les citoyens, mais plutôt pour protéger la criminalité de l’Etat". (...)
En 2016, la Cour européenne des droits de l’homme a condamné l’Italie pour ne pas avoir demandé des comptes aux agents des services secrets. En ce qui concerne Assange, il en résulte surtout une chose pour la journaliste : "Les extraditions sont des actes politiques". Car si les serviteurs de l’Etat exposés par Wikileaks sont restés impunis, Assange risque 175 ans de prison aux Etats-Unis. "Personne ne dit non au Pentagone", affirme Maurizi - l’Australien d’origine l’a fait. Malgré l’opposition du gouvernement américain, il a accepté de publier ses secrets d’Etat et a ainsi montré que les personnes exposées se sentent au-dessus des lois. (...)
Pour Maurizi, l’importance du cas Assange ne pourrait pas être plus grande, car si "la plus grande démocratie du monde" poursuit le journaliste pour avoir publié des secrets d’Etat, d’autres Etats suivront très rapidement. Elle aussi a été intimidée pendant son travail avec Wikileaks. (...)
En novembre, le livre de Maurizi "Secret Power : Wikileaks and its Enemies", déjà paru en Italie, sera publié en anglais. D’ici là, l’exposition met en lumière l’importance de la plateforme pour la liberté de la presse.

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