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le Monde Diplomatique
Aux sources de la colère contre l’impôt
Article mis en ligne le 28 novembre 2018

Apparue en marge des organisations politiques et syndicales, particulièrement suivie dans les zones rurales et périurbaines, la mobilisation des « gilets jaunes » contre les taxes sur les carburants frappe par son caractère spontané. Elle a soudainement mis en lumière le sentiment d’injustice fiscale qui couvait depuis de longues années parmi les salariés subalternes et les petits indépendants. Dans un pays où l’impôt demeure un levier pour la redistribution, comment expliquer qu’il soit davantage contesté par celles et ceux qui se trouvent en bas de l’échelle sociale ?

Halte aux taxes », « Macron Picsou », « Aller au travail devient un luxe », « Droite, gauche = taxes », « Stop au racket, la révolte du peuple puissant peut aboutir à la révolution »… La variété des slogans déployés lors des manifestations populaires qui se sont employées à bloquer les axes de circulation routière pour protester contre la hausse de la fiscalité sur les carburants, à partir du 17 novembre dernier, évoque à la fois un mouvement politiquement protéiforme et une colère ciblée sur un objet bien précis : les impôts, fondement de l’État social.

Tout au long du XXe siècle, les classes populaires se sont tenues relativement à l’écart de la question fiscale. (...)

à l’exception de la période du Front populaire (1936-1938), le thème de l’injustice fiscale continue de n’occuper qu’une place marginale dans le mouvement ouvrier, par rapport aux revendications salariales ou à la défense de l’emploi, notamment. Même le caractère inique des taxes indirectes sur la consommation telles que la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), qui représente environ la moitié des recettes fiscales quand l’impôt sur le revenu n’en représente que le quart, a rarement mobilisé syndicats et partis de gauche.

Depuis quelques années, pourtant, la contestation de l’impôt retrouve de la vigueur. Au point de s’imposer comme un enjeu central des luttes contre l’austérité. Au Portugal, en mai 2010, des dizaines de milliers de personnes manifestaient contre les hausses d’impôt et les coupes budgétaires. Deux ans plus tard, des centaines de milliers d’Espagnols se mobilisaient contre la rigueur budgétaire, les privatisations et l’augmentation de la TVA — qui venait de passer de 4 % à 21 % pour le matériel scolaire. En Grèce, salariés du public et du privé descendaient dans la rue (...)