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Quand Ford et Volkswagen livraient leurs ouvriers syndicalistes aux tortionnaires des dictatures
Article mis en ligne le 5 janvier 2018

Fin décembre, un procès inédit a débuté en Argentine : d’anciens cadres de la multinationale automobile Ford sont jugés pour leur complicité avec l’appareil répressif de la dictature militaire argentine (1976-1983), durant laquelle 30 000 personnes ont disparu et 15 000 ont été exécutées. D’anciens dirigeants de la filiale argentine de Ford de l’époque sont soupçonnés d’avoir facilité la séquestration et la torture de 24 ouvriers d’une des usines Ford du pays. « Trois délégués syndicaux n’ont jamais été retrouvés, précise le journal Le Monde.

Quelques jours avant le début du procès argentin, au Brésil, le constructeur automobile allemand Volkswagen présentait les résultats d’une recherche sur sa collaboration avec l’appareil répressif de la dictature militaire brésilienne cette fois (1964-1985), avec ses 20 000 personnes torturées et quelques centaines de morts et « disparus ». Des témoignage recueillis dans le cadre de la Commission vérité sur les crimes de la dictature brésilienne ont révélé que des ouvriers de Volkswagen avaient été arrêtés, frappés et séquestrés sur leur lieu de travail avant d’être envoyés dans des centres de tortures et en prison.

Dénoncer les syndicalistes au nom du progrès

Des responsables de Volkswagen transmettaient aux organes de répression du régime des rapports sur ses ouvriers syndicalistes (voir notre article). C’est suite à ces accusations que l’entreprise a initié cette recherche historique, confiée à un historien indépendant. L’auteur de l’étude est finalement arrivé à la conclusion qu’« une collaboration a eu lieu entre certains vigiles de Volkswagen do Brasil et la police politique, du Dops, du régime militaire ». Mais qu’« il n’y avait pas de preuve claire que cette collaboration se basait sur une action institutionnelle du côté de l’entreprise ».

Dans les années 1960, la filiale brésilienne de Volkswagen est la plus grande appartenant au constructeur hors de l’Allemagne, et la cinquième plus grande entreprises brésilienne. L’historien Christopher Kopper souligne d’une part que le directeur de Volkswagen Brésil de l’époque, Friedrich Schultz-Wenk (émigré allemand arrivé au Brésil en 1949), « n’a pas du tout été effrayé par le putsch de 1964 ». « Il y a réagi au contraire de manière très positive, euphorique », écrit-il. « Schultz-Wenk saluait l’emprisonnement des leaders syndicaux et des sympathisants de fait ou supposés des communistes », ajoute l’étude. (...)

Il est toutefois peu probable qu’un procès ait jamais lieu contre d’anciens responsables de Volkswagen au Brésil, comme c’est le cas actuellement à l’encontre de ceux de Ford en Argentine. La loi d’amnistie brésilienne de 1979 a permis d’un côté l’amnistie des exilés et prisonniers politiques, mais empêche toute poursuite judiciaire à l’encontre des responsables de la répression durant la dictature militaire.