
Le premier ministre israélien vient d’annoncer la construction d’une nouvelle clôture sur le plateau du Golan. Toujours pour des motifs sécuritaires. Mais les barrières qu’érige Israël un peu partout ont aussi une dimension économique.
Six cent soixante dix-neuf kilomètres. C’est - cumulée, au très bas mot et sans tenir compte de la bande de Gaza - la distance couverte à ce jour par des murs bétonnés, et/ou des clôtures barbelées et/ou électrifiées aux diverses "frontières" de l’Etat d’Israël. Les derniers sont tous frais. Mercredi 2 janvier, Benyamin Netanyahou s’est déplacé en hélicoptère dans le sud du pays pour inaugurer le principal tronçon de la clôture barbelée érigée sur la frontière avec l’Egypte. Un tronçon de 230 km auxquels devraient s’ajouter, dans les trois mois, 14 km supplémentaires. Au final, la bande de Gaza et la station balnéaire d’Eilat sur la mer rouge seront reliés par cette barrière haute de 5 mètres qui est censée préserver Israël de l’immigration illégale et des « militants islamistes » installés dans le Sinaï.
Quatre jours plus tard, dimanche 6, le premier ministre annonçait la construction d’une autre clôture le long de la ligne de démarcation avec la Syrie, sur le plateau du Golan. Dix kilomètres seraient déjà réalisés et une soixantaine à venir. Ces travaux dont la fin est annoncée dans l’année ont pour objectif de protéger Israël « des incursions et du terrorisme » étant entendu, selon Benyamin Netanyahou, que « de l’autre côté de [la] frontière avec la Syrie, l’armée syrienne a reculé et des agents du jihad mondial ont pris sa place ».
Au mois d’avril dernier, c’est à la frontière avec le Sud-Liban que les bétonneurs ont sévi, de façon plus modeste. A proximité de la ligne bleue [1], entre les villages de Metoula et Kfar Kila, une barrière de 5 à 7 mètres de haut et de 1 km de long a été construite.
Enfin, le mur (la « barrière de sécurité » selon la terminologie israélienne) dont la construction a commencé en 2002 en Cisjordanie et a été condamnée le 9 juillet 2004 par la Cour Internationale de Justice comme étant une violation des lois internationales, continue de s’étendre, empiétant très largement sur la ligne verte [2]. (...)
Pas besoin d’avoir fait 25 ans de psychanalyse pour saisir la métaphore évidente, d’enfermement sur soi et de peur de l’autre de la société israélienne, qu’offre cette frénésie de muraille (...)
il ne faut pas perdre de vue l’économie politique des murs d’Israël ; « Pour comprendre les motivations économiques des groupes sociaux dominants en Israël, il faut prendre en compte deux facteurs : leurs intérêts économiques et les capacités et incapacités militaires à contrôler les frontières », écrit l’universitaire Lev Luis Grinberg qui rappelle « la primauté de l’intérêt économique de groupes économiques israéliens puissants dans le maintien de l’occupation et de l’étranglement de l’économie palestinienne » [4]. Un étranglement au service duquel les « murs de protection » et autres « barrières de sécurité » prétendument érigés contre des « agents du jihad mondial » terrés à Damas, Gaza, Naplouse ou au Sud-Liban, sont des outils terriblement efficaces. (...)