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La grande subvention : Le capitalisme français sous perfusion
#capitalisme #Etat
Article mis en ligne le 29 avril 2023

Le thème est bien connu : dans notre pays, il y aurait d’un côté les « entrepreneurs » du secteur privé qui ne comptent pas leurs heures pour « créer des richesses » et des emplois, ne devant leurs revenus qu’à la force de leur travail, et de l’autre les fonctionnaires, fardeau budgétaire terrible pour la société, qui ne produisent rien d’autre que du service public déficitaire et peu performant. D’un côté un apport, de l’autre un coût. Or, rien n’est plus faux : désormais, le secteur privé coûte au contribuable bien plus cher que nombre de services publics. Car chaque année, l’Etat dépense 157 milliards d’euros en subventions, crédits d’impôts et exonérations de cotisations au profit des entreprises privées de toutes tailles et de tous secteurs. C’est deux fois le budget de l’Education nationale, et cela représente 30% du budget de l’État en 2021.

Chaque gouvernement, depuis le début des années 2000, a ajouté des dizaines de milliards d’euros transférés des ménages (les contribuables) vers les entreprises.

Tous les ministres de l’Économie, Bruno Le Maire inclus, répètent la formule magique suivante : en aidant nos entreprises, en subventionnant leurs coûts salariaux, on leur permet de restaurer leur compétitivité et de créer de l’emploi, et c’est ça que l’on veut non ?

Des milliards pour rien ?

Sauf que ça ne marche pas. Toutes les études, y compris ministérielles, sur les effets de ces 140 à 200 milliards d’euros annuel dépensés pour les entreprises privées, montrent que les effets sont faibles voire inexistants. Le dernier rapport en date, celui de l’Institut de Recherches Economiques et Sociales (IRES), n’y va pas par quatre chemins : “L’efficacité des allègements du coût du travail se trouve sans doute ailleurs : dans le soutien apporté aux marges des entreprises”, nous dit-il… et ces marges, les entreprises en font bien ce qu’elles veulent. Et ça n’a pas servi à créer de l’emploi, ni à relocaliser notre industrie, mais bien à augmenter les dividendes des actionnaires. (...)

Répartition des aides aux entreprises

Le fonctionnement de l’économie française serait donc complètement antilibéral ? Il suffit de voir ce que l’État (donc nous, les contribuables) a dépensé pour maintenir les entreprises à flot, sans rien demander en échange, pendant la pandémie de Covid-19. Ce niveau de dépense publique amène de nombreux commentateurs à dire que la France n’est pas un pays libéral, que l’étatisme y est très présent, et que nous aurions donc tort de parler, comme nous le faisons régulièrement dans nos colonnes, de “néolibéralisme” pour qualifier les politiques menées depuis trente ans. (...)

la doctrine néolibérale n’a jamais prôné la fin des transferts vers le privé, au contraire. Ce que ses partisans souhaitent, c’est que l’État ne se mêle pas du fonctionnement des entreprises, c’est tout. Mais son argent est le bienvenu. C’est pourquoi, tandis qu’il enrichit les entreprises privées et ses actionnaires, l’État réduit la régulation du droit du travail en leur sein, leur offre des marges de manœuvre plus grandes, ouvre de nouveaux marchés… Le néolibéralisme n’est pas la non-intervention de l’État. C’est une intervention massive de l’État pour aider le capitalisme à fonctionner mieux et plus fort.

Car malgré ces milliards d’euros injectés dans l’économie, nous ne sommes pas dans une économie socialiste ou administrée, comme aiment se le raconter quelques éditorialistes croulants du Figaro pour se faire peur à peu de frais. Pas du tout (...)

Les directions d’entreprise agissent de façon rationnelle : on leur donne de l’argent public sans conditions et elles en font donc ce qu’elles veulent. Et ce qu’elles veulent, c’est enrichir leur propriétaire, car c’est ainsi que le capitalisme fonctionne depuis ses débuts. L’État, par contre, agit de façon complètement irrationnelle (si du moins son objectif était de ne pas gâcher l’argent du contribuable) : il donne ses dizaines de milliards à des tiers sans leur demander des comptes sur leurs utilisations.
Des entreprises privées devenues camées à l’aide publique (...)

Le patronat, pire assisté de France ? Assurément, si l’on considère la part du budget de l’État que nous dépensons pour lui. Un quart de notre budget est consacré à ces multiples aides aux entreprises privées contre 3,2% à la solidarité, l’insertion et l’égalité des chances. Alors, qui sont les parasites ?