
Attaqué pour des dessins jugés pédopornographiques et misogynes, victime de harcèlement avant son exposition au Festival d’Angoulême, l’auteur de « Lastman » et de « Petit Paul » dénonce la confusion entre bouffonnerie et apologie. Son éditeur et le festival, qui lui consacre une exposition, dénoncent des tentatives de censure.
Aucune espèce d’accusation de violences sexuelles ne pèse sur Bastien Vivès, auteur de bande dessinée programmé cette année au festival, mais son œuvre l’incriminerait.
Depuis quelques semaines, en effet, une vague d’indignation enfle sur les réseaux sociaux à l’encontre d’un travail jugé suspect, majoritairement applaudi par un lectorat féminin à ses débuts, mais « puant l’inceste et la pédopornographie » à en croire un post Twitter très relayé. Un autre : « [Bastien Vivès] continue à être vu et traité médiatiquement comme un ado turbulent et talentueux. Alors que c’est un réac de 40 piges dont certaines œuvres participent activement et en plein jour à la banalisation de la pédophilie et à la culture du viol. » D’autres l’accusent de pédophilie, appellent au saccage de l’exposition et menacent l’intégrité physique de l’auteur, qui a déposé une main courante et n’exclut pas de porter plainte pour diffamation. Le 8 décembre, il racontait cette campagne de « harcèlement » en une série de strips à l’humour noir sur son compte... (...)
Le dessinateur Boulet, invité à l’événement aux côtés de Bastien Vivès, s’est publiquement positionné : « J’ai dit à l’orga’ que j’étais dégoûté qu’il soit là ce soir et que ça me faisait chier d’être associé à lui. […] J’ai dit à ses potes d’atelier de conseiller [à Bastien Vivès, ndlr] d’annuler sa venue. »
A la suite de cette prise de position, un second auteur très respecté des milieux « indé », Jérôme Dubois, a demandé des comptes au FIBD sur Instagram : « Dans le contexte de #MeToo, alors que le monde de la BD a déjà du mal à faire sa propre remise en question, quel message cette expo donne-t-elle de notre milieu ? » Contactée par téléphone, la scénariste et historienne Marie Bardiaux-Vaïente développe : « Comment, dans un milieu extrêmement masculin où nous, autrices, pensions avoir réussi à gagner quelques batailles depuis 2016, comment le FIBD justifie-t-il de consacrer de l’argent public à un travail qui me semble être une caricature de ce qu’on pensait ne plus jamais voir exposer dans une institution ? » L’un comme l’autre se défendent d’appeler à la déprogrammation ou au boycott. D’autres s’en sont chargés à leur place. Une pétition lancée le 8 décembre par des « étudiant.e.s en lutte » d’écoles d’art d’Angoulême demande la suppression de l’exposition (...)
Dans son bureau de Casterman, le directeur éditorial du catalogue de bandes dessinées, Benoît Mouchart, est « très ému », dit-il, de l’ampleur des polémiques. Petit Paul (qui est édité par Glénat) est loin d’être sa bande dessinée préférée, souligne-t-il dans un euphémisme. « Mais de quoi parle-t-on exactement ? A quel endroit fait-il une quelconque apologie ? Est-il désormais impossible de représenter les tabous ? » (...)
L’éditeur, de son côté, s’inquiète de la « littéralité » des regards mais aussi de l’autocensure artistique qui pourrait en découler (...)
Toujours au top au Festival d’Angoulême, on y célèbre #metoo_inceste avec une expo d’apologie du viol, de la pédocriminalité et de l’inceste.
Il y a une pétition institué par Arnaud Gallais ici pour la déprogrammation de l’expo :
Le Festival International de la BD d’Angoulême a choisi de programmer l’exposition"Dans les yeux de Bastien Vivès" sponsorisée par CASTERMAN du 26 janvier au 12 mars 2023.
Nous dénonçons la banalisation et l’apologie de l’inceste et de la pédocriminalité organisée par le dessinateur de BD Bastien Vivès à travers ses ouvrages et ses propos dangereux.
Voici des exemples de propos tenus par Bastien Vivès dans différentes interviews :
"Moi déjà, l’inceste ça m’excite à mort. Pas celui de la vraie vie, mais celui raconté, je trouve ça génial. Tous ces trucs-là font des histoires incroyables. Quand tu transgresses, quand tu fais quelque chose que t’as pas le droit de faire, c’est agréable à lire."
Bastien Vivès dessine aussi en pensant aux enfants qui tomberont sur ses BD "sur la table basse du salon des parents" :
"Un gamin, quand tu lui montres un bouquin et il y a la scène de cul, il reste dessus et c’est normal. Au moins, les gamins même s’ils comprennent pas, ils apprécieront les scènes de cul. Ils seront contents, ils auront vu une fellation".
Le Festival International de la BD d’Angoulême a de nombreux partenaires privés et publics : https://www.bdangouleme.com/partenaires-fibd
Nous leur demandons de réagir vite et nous leur rappelons que la protection de l’enfance devrait être une priorité.
Aux côtés de Be Brave France, nous demandons au Festival International de la BD d’Angoulême la déprogrramation de l’exposition de Bastien Vivès qui fait l’apologie de la pédocriminalité et de l’inceste, et de veiller à une programmation prenant en compte la lutte contre les violences sexuelles.
Lire aussi :
Des librairies retirent de la vente une BD de Bastien Vivès accusée de pédopornographie
Petit Paul, BD de Bastien Vivès publiée dans une nouvelle collection érotique lancée par Glénat et dirigée par l’ex-star du porno Céline Tran, a été retirée des ventes par les magasins Cultura et Gibert Joseph sur fond d’accusations de pédopornographie.
"Les équipes sont mobilisées. Nous procédons au retrait de la BD dans nos magasins ainsi que sur notre site. Merci encore pour votre alerte", a indiqué sur Twitter l’enseigne de distribution de biens culturels qui se présente comme le deuxième libraire de France.
Plus de 2.000 signatures sur une pétition
"Nous procéderons au retrait de la BD dans nos librairies mais également sur notre site", a annoncé de son côté le groupe de librairies Gibert Joseph sur le réseau social. Une pétition demandant son retrait des rayons, lancée ce week-end, a recueilli ce mardi 25 septembre plus de 2.000 signatures.
"Présenté par son auteur comme un livre humoristique, mais se voulant excitant car basé sur ses fantasmes, Petit Paul montre les péripéties d’un enfant de 10 ans avec un énorme pénis que vont utiliser bon gré mal gré les femmes de son entourage", indique la pétition rappelant que l’article 227-23 du code pénal interdit les représentations à caractère pornographique de mineurs.
Interrogé par BFMTV avant la sortie de Petit Paul sur les réactions que pourrait susciter l’ouvrage, Bastien Vivès avait répondu : "Je ne préfère pas y penser. Quand c’est bien fait, quand ce n’est pas abêtissant, quand ce n’est pas malveillant, ça passe très bien."
"Préparez-vous pour le procès !"
Les éditions Glénat ont défendu dans un communiqué leur auteur : "Nous réfutons fermement et catégoriquement les accusations de pédopornographie dont Petit Paul fait l’objet. Aussi obscène et provocatrice qu’on puisse la considérer, cette œuvre de fiction n’a jamais pour vocation de dédramatiser, favoriser ou légitimer l’abus de mineur de quelque manière que ce soit".
La maison d’édition, qui se dit "particulièrement attentive à ce qu’elle publie" et "assume l’ensemble de ses choix éditoriaux", poursuit : "Il s’agit d’une caricature, dont le dessin, volontairement grotesque et outrancier dans ses proportions, ne laisse planer aucun doute quant à la nature totalement irréaliste du personnage et de son environnement."
L’association internationale des victimes de l’inceste a cependant annoncé dans un tweet son intention de porter plainte : "Préparez-vous pour le procès ! On verra bien ce que pensent les juges de la mise en images des ’aventures’ sexuelles d’un garçon de 10 ans !!", peut-on lire sur le compte de l’association.
"Ce n’est pas le livre qu’on critique ici mais le tout"
Ce n’est pas uniquement l’album Petit Paul qui créé polémique, mais aussi des propos tenus par Bastien Vivès dans une interview accordée au Huffington Post : "Si ce n’est pas excitant, j’espère au moins que les lecteurs se marreront", explique notamment l’auteur de Polina au pureplayer. Une déclaration dénoncée par la dessinatrice Tanx sur son blog :
"Ce n’est pas le livre qu’on critique ici mais le tout : comme d’habitude on voudrait nous faire séparer l’artiste de sa création, quand les deux disent la même chose", analyse l’autrice. "Vivès dit, noir sur blanc, qu’il espère exciter son lectorat. Il dit qu’il ne peut pas dessiner ce qui ne l’excite pas, et ce thème récurrent de pédophilie s’étale livre après livre dans sa production." (...)
Contacté lundi 24 septembre par Le Parisien, Bastien Vivès maintient sa position :
"C’est une BD qui parle de cul de manière décomplexée. C’est clairement pour adultes et c’est sous scellé. On est plus dans le fantasme que dans la réalité. Et quand je parle de mes fantasmes, je parle bien sûr d’être dans la même situation que Petit Paul… Mon truc à moi c’est plutôt les gros seins, pas les enfants… Ce bouquin, c’est comme une grosse blague, pour faire rigoler les gens. Certainement pas une apologie de la pédophilie."