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Amnesty International
Des entreprises de l’UE vendent des outils de surveillance à des responsables d’atteintes aux droits humains en Chine
Article mis en ligne le 25 septembre 2020
dernière modification le 24 septembre 2020

Amnesty International a découvert que trois entreprises installées en France, aux Pays-Bas et en Suède ont vendu des systèmes de surveillance numérique, tels que des outils de reconnaissance faciale et des caméras réseau, à des acteurs stratégiques du dispositif chinois de surveillance de masse. Les produits exportés ont parfois été directement destinés aux programmes de surveillance de masse non ciblée mis en place par la Chine, posant ainsi le risque d’un usage contre les Ouïghours et d’autres groupes ethniques à majorité musulmane sur le territoire.

La plupart des gouvernements de l’UE, dont ceux de la France et de la Suède, s’opposent aux appels en faveur d’une réglementation plus stricte des exportations, incluant notamment de solides garanties en matière de droits humains pour les technologies biométriques de surveillance, un secteur dominé par les entreprises européennes. L’Allemagne, qui assume la présidence de l’UE depuis le 1er juillet, et les Pays-Bas ont l’un comme l’autre reconnu par le passé la nécessité de mettre en place des garanties plus solides en matière de droits humains, mais n’ont pas réussi à ce jour à faire bouger les choses à l’échelon européen. (...)

Des projets de surveillance de masse, à l’image de « Skynet » et « Sharp Eyes », sont déployés un peu partout sur le territoire chinois pour maintenir la population sous une surveillance constante. Les services chinois en charge de la sécurité publique jouent un rôle essentiel dans l’expansion sans précédent de ce dispositif de surveillance. Les technologies biométriques de surveillance sont omniprésentes dans la région autonome ouïghoure du Xinjiang, dans le nord-ouest de la Chine, où le nombre d’Ouïghours et de membres d’autres groupes ethniques retenus arbitrairement captifs dans des camps dits de rééducation est estimé à près d’un million.

« La condamnation par les gouvernements de l’UE de la répression systématique exercée dans le Xinjiang sonne creux s’ils persistent à autoriser les entreprises à vendre les technologies qui risquent justement de rendre possible cette répression. Le régime européen de contrôle des exportations actuellement en vigueur ne fonctionne pas et ses brèches doivent être colmatées rapidement », a déclaré Merel Koning.

Les outils biométriques de surveillance, et notamment les logiciels de reconnaissance faciale, sont au nombre des technologies de surveillance numérique les plus intrusives (...)

Au cours de ses recherches, Amnesty International a constaté qu’Axis Communications, une entreprise suédoise, se vantait même sur son site Internet de sa participation à l’expansion du dispositif de surveillance chinois. (...)

Une entreprise néerlandaise, Noldus Information Technology, a vendu des systèmes de reconnaissance des émotions à des organes responsables de la sécurité publique et de l’application des lois en Chine. (...)

Le système juridique chinois ne respecte pas les normes internationales à de nombreux égards, et est régulièrement utilisé à mauvais escient par les autorités pour restreindre les droits humains.

Amnesty International a également constaté que l’entreprise néerlandaise avait vendu ses technologies de surveillance numérique à au moins deux universités du Xinjiang entre 2012 et 2018. (...)

En 2012, on savait déjà que les autorités chinoises amalgamaient régulièrement les pratiques culturelles et religieuses ouïghoures et le terrorisme. Dans les années qui ont suivi, l’utilisation des progrès technologiques aux fins de répression des minorités dans le Xinjiang est devenue manifeste, les autorités chinoises manifestant un intérêt tout particulier pour les systèmes d’analyse émotionnelle et comportementale.

Les exportations de ces entreprises européennes qui ont fait l’objet d’investigations de la part d’Amnesty International posent un risque important pour les droits humains. Aucune de ces entreprises n’a apporté à l’organisation de réponse claire quant à la diligence raisonnable qu’elle a exercée avant la conclusion de ces transactions. C’est l’une des raisons pour lesquelles l’UE doit agir maintenant.

Le rapport d’Amnesty International illustre les principales lacunes du régime de contrôle des exportations actuellement en vigueur dans l’UE, à savoir le règlement sur les biens à double usage. (...)