L’ancienne ministre de l’Environnement Corinne Lepage, qui avait appelé à soutenir Emmanuel Macron en 2017, reconnaît dans cette tribune s’être trompée : le gouvernement nous a fait entrer en matière écologique « dans une ère de régression d’autant plus dangereuse qu’elle s’accompagne d’une communication permanente et habile directement contraire à la réalité des choix qui sont opérés ».
Lorsque j’avais décidé à la fin de l’année 2016 de soutenir la campagne d’Emmanuel Macron, je ne l’avais pas fait en raison de ses convictions écologistes mais parce que je pensais sincèrement que son intelligence lui avait permis de percevoir la gravité des défis auxquels nous sommes confrontés et la nécessité d’entreprendre dans ce domaine comme dans les autres des réformes de structure permettant de changer de logiciel. La nomination de Nicolas Hulot numéro trois du gouvernement était d’excellent augure.
Malheureusement, je me suis trompée car la politique menée aujourd’hui par M. Macron est différente de celle de ses prédécesseurs, mais au mauvais sens du terme. Nous sommes en effet entrés dans une ère de régression d’autant plus dangereuse qu’elle s’accompagne d’une communication permanente et habile directement contraire à la réalité des choix qui sont opérés.
Les discours sont brillants, qu’il s’agisse de ceux du président de la République, qui se veut le chantre mondial de la lutte contre le dérèglement climatique, ou de ceux du ministre d’État, qui défend d’autant mieux une vision écologique du monde qu’elle concerne le très long terme et permet donc de passer sous silence les décisions catastrophiques et contre-productives qui sont prises. À ceci s’ajoute le fait que le ministre d’État s’est vu imposer de présenter lui-même comme de bonnes décisions les arbitrages qu’il a perdus, donnant ainsi le sentiment que plus personne ne défend l’environnement.
Et pourtant, sur quelques dossiers, les régressions sont patentes. (...)
Le plus grave tient sans doute aux atteintes multiples portées au droit de l’environnement, qui devient dans bien des cas une option et non une obligation. Au nom de l’expérimentation, il est désormais possible de s’affranchir des normes environnementales ; les études d’impact sont réduites à leur plus simple expression, la rubrique des installations classées soumises à autorisation se réduit comme une peau de chagrin au bénéfice d’installations soumises à une simple déclaration voire à rien.
Et la démocratie environnementale s’est perdue dans les sables mouvants d’une réforme constitutionnelle dans laquelle la troisième chambre, qui aurait dû être celle du long terme avec les droits de veto indispensables, va rester un accessoire peut-être même dangereux si la réforme prétend la substituer à toutes les autres expressions de la société civile.
Un quinquennat dure cinq ans. Il reste quatre ans pour changer de braquet, de direction et de sens.